C'est vrai que l'on a un peu l'impression de se retrouver dans un film de série B des années 60, les dialogues d'Audiard en moins, à tout le moins pour le moment.
On le sait, et l'on connaît parfaitement ces chiffres, le barreau de Paris représente 50% des avocats en France et 70 % du chiffre d'affaires.
Ceci nous autorise-t-il à être souvent arrogants ?
Je ne suis pas persuadé, même dans un système démocratique, que parce que l'on a la majorité, l'on a forcément raison.
Surtout, les vertus cardinales, nos principes essentiels que l'on apprend à nos élèves de l'école de formation, à savoir, notamment, la courtoisie et la délicatesse, on devrait peut-être se les appliquer de temps en temps.
1. Nous voilà donc fâchés avec la caisse nationale des barreaux français (CNBF) qui regroupe 145 délégués dont 53 avocats parisiens, et plusieurs jeunes avocats revendiquant leur appartenance à quelques syndicats, élus au suffrage universel et qui a voté, à l'unanimité rappelons-le et après une large concertation, la seule réforme possible qui permettait de sauvegarder nos réserves, notre identité, et les retraites qui seront versées à nos confrères dans 30 années.
Prétendre comme on l'a lu à certains endroits qu'il s'agirait d'asservir les jeunes pour qu'ils payent les cotisations des plus anciens en leur permettant d'aller jouer au golf, est non seulement une méconnaissance totale des principes régissant les retraites mais encore une insulte au bon sens.
Une caisse de retraite ne réagit pas sous le coup des effets d'annonces, parfois volontairement populistes, mais définit une politique prospective à échéance de 30 ans.
Soyez persuadés que le conseil d'administration travaille assidûment, plusieurs samedis de l'année, en ce sens.
Ce qui a donc été sauvé, ce n'est pas la retraite des 50/60 ans qui elle est déjà provisionnée, et donc payée, mais bien celle de ceux qui jouent l’effraiement aujourd'hui, à savoir les 30/40 ans.
La cotisation de base, d'un montant de 1800 €, en 2015 devrait passer, dans 15 ans, en 2030, à plus ou moins 3200 €.
Si l'on s'intéressait un tout petit peu au sujet l’on n’aurait pas manqué de remarquer qu'il y a 15 ans, en 1999, à un autre siècle donc, la cotisation, en un euro qui n'existait pas encore, était de… 2270 € ! Ces 15 000 frs de l'époque, ou 2270 €, n'étaient-ils pas beaucoup plus difficile à supporter, que ce que représenteront 3200 €, 30 ans après ?
La réponse est évidemment dans la question, et il n'y a qu'à se rapporter au prix d'un café, une baguette de pain, ou d'un litre d'essence il y a 15 ans…alors dans 15 ans encore …
2. Nous voilà fâchés aussi avec, il semblerait que ce soit une constante, l'unanimité une fois encore, des anciens bâtonniers de Paris.
Par deux fois ils ont tenté de faire valoir leur expérience et une certaine sagesse par deux fois ils ont été ignorés.
Il serait temps de renouer le contact, car l'on ne peut se priver de leur voix.
J'ose espérer que je reverrai avant la fin de mon mandat les portraits des bâtonniers dans les locaux de l'ordre, qui aujourd'hui font cruellement défaut.
3. Enfin nous voilà fâchés, non pas seulement avec le conseil national des barreaux mais aussi avec la grande majorité des avocats français.
Moi non plus, je n'étais pas forcément favorable à un mouvement de grève alors que notre profession doit aller de l'avant et ne peut être uniquement réactionnaire.
Néanmoins, on aurait pu faire preuve d'un peu plus de la solidarité, ne serait-ce que dans la forme.
L'on peut, et l'on doit surtout, et sans relâche, expliquer et convaincre, ce sont un peu les fondements de notre vocation, et non essayer d’imposer nos idées à ceux que nous n'écoutons pas.
Moi aussi, je suis plutôt favorable à un ordre national et à tout le moins à une réforme radicale du conseil national des barreaux et de la gouvernance de notre profession, je ne suis pas fondamentalement opposé à la suppression de la postulation, je pense que l'avocat en entreprise est nécessaire sauf à ce que tous les postes soient pris, même dans nos entreprises, par les avocats étrangers, et enfin je pense que les capitaux extérieurs minoritaires devraient permettre à nos structures de devenir plus compétitives.
Mais cela, encore faut-il en discuter avec ceux de nos confrères, majoritairement de province, qui y sont opposés et parfois avec des arguments recevables.
C'est au moins l'avantage des organisations nationales telles que la CNBF ou des manifestations sportives dont dernièrement la Juris Cup, ou l’open des barreaux, car à cette occasion, l’on peut rencontrer des confrères non parisiens.
Je vous l'assure, et vous pouvez me croire il y a aussi des gens très bien en province, intelligents, plein d'humour et d'élégance.
Ce pseudo monopole parisien, auto attribué, non pas du cœur, mais de tout le reste dont s'arroge Paris est souvent intolérable et peu admissible.
Si nous devons être les champions du monde de quelque chose essayons d'être ceux… d'une certaine humilité, cela ne nous fera pas de mal.
Pour ma part, reprenant le leitmotiv qui circule sur Facebook :
« Je vais à la Convention Nationale des Avocats qui se tient des 28 au 31 octobre à Montpellier. Allons-y nombreux ! »
Enfin, et pour en terminer, je laisse le mot au scénariste de génie et à une réplique du film cité en titre :
« Je ne critique pas le coté farce, mais pour le fairplay y aurait quand même à dire… »