Vous voyez, mon cher Jacques, même en ces circonstances, et malgré vos demandes insistantes, je n'arriverai pas à vous tutoyer.
Il faut dire que vous avez été mon premier patron, le seul d'ailleurs.
Vous nous avez quitté, en cette veille de Noël, pourtant encore bien jeune et alors que nous avions tellement de choses à nous dire.
Peut-être pas d'ailleurs, tant parfois les mots peuvent atténuer la qualité des sentiments et le respect mutuel, à tout le moins j'aime à le croire, que l'on se porte.
Comme le dit une chanson, les mots ne sont pas vraiment nécessaires.
Quel honneur et quelle chance, que l'on souhaite à tous ceux qui débutent, d’avoir pu commencer dans cette profession à vos côtés et à ceux de votre père, mon âme sœur malgré les années d'écart.
Tous, autant que nous étions, vous nous avez appris le métier, la plaidoirie, et quelques tournures de phrases que nous conservons encore.
Vous nous avez surtout enseigné, ce qui je crois se perd aujourd’hui, que la pression externe, celle des clients, des horaires, des magistrats, était suffisante pour qu'on n'y ajoute pas une pression interne inutile.
Et puis surtout, toujours et encore, du détachement, de l'humour, et de la bonne humeur qui n'empêchaient jamais, un professionnalisme de tous les instants.
Enfin, votre générosité, mon cher Jacques, et des endroits où vous nous receviez, et dont les noms resteront associés à vous et à votre famille : « La Ville aux Clercs » ou « Les Contamines Montjoie ».
« Quand j'avais 30 ans, c'était vraiment une bonne année… »
Des personnes comme vous, on en rencontre 3 ou 4 dans sa vie et malheureusement je viens d'en perdre une.
Votre humanisme, votre culture, votre foi, nous permettaient toutes les discussions dont les religieuses, vous protestant, moi catholique, n'étaient pas les moindres.
Je partageais votre espérance en une vie éternelle et en un après.
Je vous envie un peu, cher Jacques Valluis, car aujourd'hui… Vous savez…