Nous le savons tous, et nous le redoutons à chaque audience lorsque ceux-ci sont présents, nos clients peuvent être nos plus redoutables ennemis.
Lorsque le président d'audience s'adresse à eux à la fin de nos plaidoiries nous avons tous, à cet instant, un léger frisson dans le dos : « Pourvu que celui-ci ne dise pas exactement le contraire de ce que je viens de plaider. »
Personnellement, cela m'est arrivé il y a quelques années, devant l'inénarrable conseil des prud'hommes de Longjumeau, où j'avais bataillé ferme durant plusieurs minutes pour essayer de diluer la responsabilité de mon client et surtout l'imputabilité de la faute grave qui lui était reprochée, excipant du fait qu'il n'y avait aucune démonstration qu'il en était responsable.
Ce dernier interrogé par le Président en fin d'audience n'avait pas pu s'empêcher de dire : « Monsieur le président je tenais à présenter mes sincères excuses à la société pour cette faute… »
Sortant de la salle d'audience, il n'avait pas non plus manqué de m'interroger : « Comment ai-je été maître ? »
« Cher Monsieur, vous avez été remarquable puisque votre dossier doit être considéré comme terminé, la cause étant bien évidemment entendue… »
Ce matin, devant la cour d'appel de Versailles, c'est mon adversaire qui a eu à affronter la propension de nos clients à ne pas forcément écouter ce que nous plaidons et à dire le contraire.
S'agissant d'un licenciement économique, et de la possibilité de réembauchage que je soutenais, notamment pour certains postes qui auraient nécessité une formation complémentaire le président interroge alors la société : « Auriez-vous pu réembaucher le salarié sur ce poste »
« Tout à fait Monsieur le président, mais du fait de la personnalité de ce salarié nous ne l’avons pas souhaité… »
Délibéré dans un peu plus d'un mois.